Le Paradoxe d'Olbers Chéseaux

Cette page est une compilation de quelques textes
d' extraits de conférences données à Lyon dans
le cadre de L'Université Ouverte et de quelques heures
de discussion entre amateurs.
Des liens sur ce sujet sont indiqués en fin de page.
merci pour vos critiques et suggestions
roland.carisio1@libertysurf.fr

Les questions les plus simples en apparence cachent parfois les problèmes les plus profonds . Depuis toujours, les hommes ont pu voir que le soir, après le coucher du soleil , le fond du ciel devenait noir entre les étoiles qui scintillent.
Dans la conception antique d'un monde fini , contenu dans une sphère, le fait que le ciel soit sombre est naturel. La Terre était le centre d'un monde limité .
Les trois systèmes philosophiques grecs.
I – modèle atomiste
L'univers est infini , répété à l'identique la répartition des étoiles est aléatoire
II – modèle aristotélicien
Le géocentrisme , les étoiles et les planètes gravitent circulairement autour de la Terre  et marquent la limite au delà de laquelle plus rien n'existe , ni espace ni vide ni temps.
III – modèle stoïcien (Zénon de Cittium):
L'univers a un volume fini dans un vide infini

Depuis Copernic la Terre n'est qu'une planète identique à d'autres et le Soleil une étoile comme les autres . Les étoiles sont des étoiles quelque soit l'endroit de l'univers . A grande échelle la densité d'étoiles est constante bien que localement des écarts de 1 à 10 existent dans un volume de 1 parsec cube . Dans la région du système solaire il y a environ 1 étoile par parsec cube
Ce n’est pourtant qu’au XVIIIème siècle qu'il fut réalisé que l'obscurité du ciel nocturne posait un important problème " cosmologique " c’est à dire lié à la structure et à l’évolution de l'univers tout entier. Seules nos connaissances les plus récentes sur l'organisation du cosmos ont put mettre un peu de clarté dans l'obscurité du ciel nocturne.
Si l'on fait la supposition la plus simple possible c’est à dire celle d’un univers newtonien, infini , statique et uniformément peuplé d'étoiles, on est inévitablement conduit à la conclusion que le ciel devrait être extrêmement brillant, même la nuit.

La démonstration est aisée : découpons l'espace en  coquilles sphériques (centrées sur un observateur O) et ayant pour rayons 1 , 2 3 parsec  , ce nombre de coquilles est infini si l'espace est infini . la quantité de lumière qui parvient à l'observateur (O) depuis les étoiles comprises entre 2 coquilles est toujours la même quelque soit le rayon moyen . Par exemple la quantité de lumière provenant de chacune des étoiles comprises entre 11  et 12 parsec est 4 fois celle des étoiles comprises entre 20 et 21 parsec , mais le nombre de ces étoiles est 4 fois supérieur de sorte que le total reste le même , l'éclairement produit par une source lumineuse diminue en raison inverse du carré de la distance et le volume compris dans l'intervalle de 2 coquilles croit comme le carré du rayon moyen.
Spécifions bien ce que représente celle quantité : c’est l'énergie provenant de la coquille envisagée et reçue par unité de temps et de surface sur une sphère centrée en O (le rayon de cette sphère, par exemple la terre, est bien sur négligeable par rapport aux distances stellaires)

Cette énergie reçue tend vers l'infini si l'univers est infini et statique . L’énergie reçue par chaque couche augmente comme r 2, mais l’affaiblissement dû à l’effet de distance se comporte comme l / r2  ce qui fait que nous recevons de chaque coquille , proche ou lointaine, exactement la même quantité d’énergie . La somme jusqu’à l'infini de ces contributions toujours identiques devrait alors produire un ciel infiniment brillant. C’est là ce qu’on appelle le paradoxe du ciel nocturne ou paradoxe de Cheseaux - Olbers

Les étoiles elles mêmes sont opaques et ne laissent pas passer la lumière des astres les plus éloignés. En tenant compte de cet effet d’écran dans le calcul, on trouve que le ciel ne devrait pas être infiniment brillant mais brillant comme la surface des étoiles . C’est une correction importante mais qui ne résout pas du tout le paradoxe du ciel nocturne .Notre expérience quotidienne contredit le résultat de calcul simple effectué ci dessus Heureusement d’ailleurs, car Si le ciel était aussi brillant que le soleil, la vie n’existerait pas.
Depuis près de deux siècles et demi , des solutions , souvent très diverses , ont été proposées pour résoudre le paradoxe du ciel nocturne.

La découverte du paradoxe du ciel nocturne

On ne trouve aucune allusion au paradoxe chez les Grecs, ce qui peut paraître étonnant vu leur grand intérêt pour les questions se rapportant à la géométrie . La raison est, vraisemblablement , que les Grecs étaient très attachés à l'idée d’un univers fini , fortement défendue par Aristote. La première allusion à l'effet cumulé de la lumière des étoiles est due à Képler. Au début du XVIIIème siècle , il n'était pas encore bien établi que les étoiles sont des astres analogues au soleil
En 1610 , en réponse à un ouvrage de Galilée qui disait qu’avec son télescope il voyait des myriades d’étoiles , Kepler fit remarquer qu'elles  ne sauraient être des astres comparables au soleil car la lumière de tous ces soleils devrait alors collectivement dépasser en brillance celle de notre soleil . Ce n’est pas encore la découverte du paradoxe du ciel nocturne mais c1est une remarque qui place Képler parmi les précurseurs de cette découverte.
L’astronome anglais Edmund Halley , dont le nom est attaché à la plus fameuse des comètes , est un autre précurseur de la découverte du paradoxe du ciel nocturne. Halley tout comme Newton, était très favorable à l'idée d’un univers infini , qu’il avait soutenue dans divers travaux. Dans un article publié en 1720 il répondit à une objection qu’on lui avait formulé contre ce caractère infini de l’espace:  " un autre argument que j1ai entendu soutenir est que si le nombre des étoiles fixes était infini , l’ensemble de la sphère céleste serait lumineux ".
 Dans un article , Halley rejeta rapidement cette objection en disant qu’au dessous d’un certain seuil de brillance, l'œil ne perçoit plus rien et qu'alors, la contribution des étoiles distantes est négligeable . Cet argument était faux et revenait , en fait , à nier l'existence du paradoxe , puisque c’est précisément la contribution cumulée des étoiles faibles invisibles en tant que telles qui devrait produire la brillance du ciel nocturne . Halley n’apparaît donc pas comme l’auteur de la découverte du paradoxe du ciel nocturne , cependant son travail est important dans ce contexte.
C’est Jean Philippe Loys de Chéseaux, un jeune astronome vaudois, qui en 1743 fut le premier à réaliser le caractère très paradoxal de la noirceur du ciel nocturne.
Chéseaux montre que la distance moyenne des étoiles qui ne sont cachées par aucun obstacle matériel à la vue des astronomes , est de l’ordre de 3 millions de milliards d’années lumière dans notre Univers et que si faible que soit l’absorption dans le milieu interstellaire, elle suffit à étouffer la lumière des étoiles lointaines (il croyait que l’espace était rempli d’un fluide absorbant)
Il présenta ce résultat dans un essai paru à Lausanne et Genève en 1744. On peut y lire notamment : " De là il suit que Si l’espace étoilé est infini ,.... chaque point du ciel nous paraîtrait aussi lumineux qu’un point du soleil de même grandeur apparente     La différence énorme , qui se trouve entre cette conclusion et l’expérience , fait voir , ou que la sphère des étoiles fixes , non seulement n’est pas infinie , mais même qu’elle est incomparablement moindre que l’étendue finie que je lui ai supposée , ou que la force de la lumière décroît en plus grande proportion , que la raison inverse des carrés des distances"
Ces étonnantes déductions illustrent bien le génie de Loys de Cheseaux , qui , il faut le souligner, fut aussi l’auteur de la première estimation quantitative correcte de la distance des étoiles.
Le paradoxe du ciel nocturne a une importance fondamentale: il marque la naissance de la cosmologie scientifique , même si , à l’époque , rares furent ceux qui réalisèrent l’impact des découvertes de Cheseaux.
En 1823 , un médecin et astronome amateur allemand, Wilhelm Olbers , redonna une actualité au problème  C’est ainsi que souvent le paradoxe du ciel nocturne est appelé paradoxe d’Olbers auquel certains préfèrent maintenant l’appellation de paradoxe de Cheseaux-Olbers ou paradoxe du ciel nocturne. Cheseaux, suivi par Olbers, avait supposé, pour expliquer le paradoxe , que l’espace était rempli d’un fluide ténu et absorbant. Cette explication n’était pas la bonne: le fluide serait lentement chauffé et réémettrait à son tour toute la lumière reçue.
En 1848 John Herschel propose une autre approche du problème qui demande une organisation particulière de l'univers , mais tout de même proche de celle que nous lui attribuons:
les étoiles doivent être groupées en galaxies avec des distances intergalactiques très supérieures aux distances intra galactiques ; les galaxies doivent être groupées en amas galactiques séparés par des distances très supérieures à leur taille individuelle ; les amas doivent être groupés en super amas et ainsi de suite sur une infinité de niveaux hiérarchiques
On montre alors que sous certaines conditions (il ne faut pas qu’il y ait trop d’étoiles ) un tel Univers est sombre . Bien qu’il soit infini et contienne une infinité d’étoiles , son ciel n’est pas tapissé d’étoiles mais seulement parsemé de points lumineux sur un fond dominant noir , levant ainsi de manière élégante le paradoxe.

A la fin du XVllème siècle prenant conscience du caractère fini de la vitesse de la lumière , les astronomes savaient que , la lumière ne parcourant qu’une distance finie en un temps fini l’observation des étoiles ne révèle que leur passé
Dès lors se profile l’explication toute bête du paradoxe : Si l’Univers n’existe que depuis T années, la lumière des étoiles situées à plus de T années lumière n’est pas encore parvenue jusqu’à nous et l’on ne peut voir que les étoiles situées dans la sphère de rayon T années lumière centrée sur la Terre . Si ces étoiles ne sont pas assez nombreuses le ciel est noir .... Cette explication est due à Edgar Poe.

Lord Kelvin reformula l’intuition d'Edgar Poe de façon plus rigoureuse peu après 1900, elle est considérée aujourd’hui comme une des cause principales de l'obscurité’ du ciel nocturne.
La théorie de la relativité générale d’Einstein expliquant que la matière et l'énergie que contient l’espace lui donne une courbure , que tous les objets suivent ~ lignes droites qui tournent au gré des masses présentes dans leur voisinage . On pourrait penser que 11argument de la ligne de visée ne tient plus.
Ce raisonnement est faux car la ligne de visée est également soumise à la courbure de l’espace , pouvant faire plusieurs fois le tour d’un Univers ( surtout d’un Univers fini ) et finir par s’interrompre sur la surface d’une étoile.
La solution du décalage spectral vers le rouge partant d’un Univers infini en expansion et d’âge infini fut également proposée
Après Olbers et Herschel , le paradoxe du ciel nocturne ne fût guère un sujet aigu de discussions. Il ne redevint une question d’actualité qu’en 1948 avec les travaux de Bondi et Gold sur la théorie aujourd’hui abandonnée, de l’état stationnaire.
La Diversité des interprétations actuelles

Il serait faux de croire qu’actuellement l’unanimité des auteurs soit parfaitement réalisée sur l’explication du paradoxe du ciel nocturne . même dans le contexte des modèles de Friedmann , les meilleurs ouvrages de cosmologie actuels divergent encore fortement sur l’explication du paradoxe du ciel nocturne , comme le montre les exemples du tableau ci dessous:
 

Année Auteur et ouvrage                         Explication proposée

1972 S. Weinber                                   Age fini de l’univers. L’intégrale
Gravitation and Cosmology                 du flux converge, car les limites
                                                               d’intégration sont finies et l’intégrant et fini
 

1974 E. R . Harrisson                         Le temps de vie des étoiles est trop faible
                                                             pour saturer l’univers en rayonnement (Effet Harrisson)
  Physics today

1975 D. Sciama                                   Effet du décalage spectral
 Modem Comnology

1976            J Narificlikar                   Effet du décalage spectral et effet de l’augmentation
                                                             des intervalles temporels
  The structure of the   Universe
 

1978 J. Gunn                                      L ‘âge fini de l’univers et le décalage spectral
  Observationnal Cosmolog y            L'âge fini est le plus important

1980  j. Silk                                          Effet Harrisson et décalage spectral des galaxies
  The Bîg Bang

Cette diversité des interprétations à l’heure actuelle , près de deux siècles et demi après la découverte du paradoxe du ciel nocturne est très surprenante
La théorie mathématique n’a pas été reprise ici.

Conclusions
Il n’y a pas une cause unique , seule responsable de la noirceur du ciel nocturne.
On peut distinguer deux causes : chacune est essentielle et correspond à rune des deux sources principales de photons dans l’univers.
L’une de ces sources est le fond de rayonnement thermique à 30K provenant de la sphère d’opacité , l’autre source , moins importante dans l’univers  est le rayonnement des étoiles et des galaxies
 La contribution lointaine de la sphère d’opacité ,oû que celle ci se trouve et quelles que soient ses propriétés , est affaiblie par le décalage spectral dû à l’expansion de l’univers Le décalage spectral est donc l'effet prépondérant pour l’affaiblissement de cette source de rayonnement.

2 Les étoiles sont des sources trop éphémères pour que compte tenu de leur densité dans l’univers , elles puissent saturer l’espace de leur rayonnement . Pour que le ciel fût aussi brillant que le soleil , il aurait fallu que la durée de vie moyenne des étoiles , soit que la densité des étoiles dans l’espace , fût de l’ordre de 104 fois plus grande.
De fait ,la portion de 1’umvers de laquelle nous pouvons recevoir la lumière des étoiles est limitée à une distance finie de l’ordre de 10 milliards d’années lumière et dans ces limites la densité en étoiles est à fortiori trop faible pour produire un ciel brillant.
Cependant il faut bien souligner que pour cette seconde source de rayonnement l’âge fini de l’univers n’apparaît pas comme le fait essentiel , contrairement à plusieurs des interprétations proposées pour résoudre le paradoxe du ciel nocturne . En effet , même Si notre horizon cosmologique n’était pas limité par l’âge fini de l’univers , les étoiles , vu leur nombre et leur durée de vie limitée, ne pourraient produire un ciel brillant.
Pour terminer , nous pouvons encore faire la remarque que cette distance de 10 années lumière est évidemment liée au modèle d’univers de Friedmann qui suppose un âge fini de l'univers Cependant nous remarquons que ce n’est pas par hasard que l’âge t de l'univers actuel est du même ordre de grandeur que la durée de vie t* des étoiles du type solaire. En effet, Si t était d’un ordre beaucoup plus grand que t* toutes les étoiles seraient sans doute éteinte dans un Univers qui serait alors formé d’astres compacts ; la vie sur terre ne bénéficierait pas d’une précieuse source d’énergie en son voisinage. Inversement , si t était d’un ordre beaucoup plus petit que t* , les étoiles n’auraient pas encore eu le temps de synthétiser les éléments lourds nécessaires à la vie . Par conséquent, la vie dans l’univers ne peut exister pendant une période oû l’ordre de grandeur de t ne diffère pas trop de celui de période dans laquelle nous nous trouvons  .

Les Sciences du ciel Pierre Léna Flammarion 1996
Les modèles cosmologiques modernes résolvent le paradoxe en introduisant de nouvelles hypothèses sur les propriétés de l'univers . En effet le modèle communément accepté au XXème siècle est celui d’un Univers évolutif, en expansion dans lequel les étoiles n’ont pas toujours existé. Ainsi l’Univers observable n’est pas infini?. De plus , les étoiles ne brillent pas toujours leur durée de vie t est en moyenne de 10 milliards d’années . Le ciel est noir car les étoiles vivent trop peu et sont trop peu nombreuses . Un simple raisonnement montre en effet que le rapport du volume de l’Univers au volume qu’occupe le rayonnement d’une étoile est trop faible pour que le ciel soit brillant

Université tous âges Lyon 1997 L'Homme et le ciel Mr Gilles Adam:
Supposons soit comme on peut l'imaginer:
infini , partout semblable à lui même , et donc peuplé d’étoiles et de galaxies toutes immobiles dans l’espace . Mors dans quelque direction que l’on regarde , le rayon visuel devrait rencontrer la surface d’une étoile , proche ou immensément lointaine . Comme la brillance apparente d’une surface ne dépend pas de la distance à laquelle on observe cette surface, le ciel devrait avoir, uniformément, la brillance de la surface solaire elle n’est visiblement pas le cas et donc une des hypothèses est fausse.
On sait aujourd'hui que c’est l’expansion de l’Univers son âge relativement faible qui font que le ciel reste noir. Il n’y a tout simplement pas assez d’étoiles dans l’Univers observable pour rendre le ciel semblable à la surface du soleil:
quand nous regardons très loin nous finissons par remonter Si loin dans le temps que nous atteignons une époque oû étoiles et galaxies ne brillaient pas encore, et où nous ne pouvons donc voir que le noir de l’espace
La simple observation du ciel nocturne à l'œil nu permet donc déjà de s’interroger sur la structure et l’évolution de l’Univers dans son ensemble , et d’obtenir des éléments de réponse; un grand télescope n’est pas nécessaire pour faire de la cosmologie

Université ouverte 1999 Mr Ruhla pr. émérite Université  Lyon :

En 1823 1826 le paradoxe d'Olbers a conduit par étapes successives à la détermination de la structure fractale de l'univers (La Recherche n° 305 Oct. 1998) .

Qu'est ce qu'une forêt profonde ?
C'est une forêt  où  l'on ne voit pas la fin , on voit toujours un arbre si l'on porte le regard dans quelque direction que se soit , alors qu'un bosquet permet de voir de la lumière. La forêt profonde s'étend sur une grande surface ne permettant pas de voir les limites ( il s'agit d'une forêt naturelle , sans régularité sans alignement fait par l'homme.
Remplaçons les troncs d'arbres par des tubes lumineux , alors dans toutes les directions la forêt de tubes est blanche.

Pourquoi le fond du ciel est noir?
Dès 1823 Olbers s'est posé la question à une époque où l'on réalise que les étoiles sont hors du système solaire . Il a fait un pari sur la structure de l'univers en l'imaginant formé d'étoiles , réparties en moyenne avec une densité constante et s'étendant à l'infini.
Quelque soit la direction où porte le regard on verra toujours une étoile , il y aura donc nécessairement autour de l'observateur de la lumière d'étoiles et alors le fond du ciel doit être blanc , lumineux comme le Soleil .

Cette observation nous permet d'avoir une information sur la structure de l'univers sans l'observer: si les étoiles sont distribuées aléatoirement dans l'espace jusqu'à l'infini , avec une densité uniforme , le fond du ciel devrait être blanc .
Le fond du ciel n'est manifestement pas blanc , donc au moins une de ces deux hypothèses est fausse
En 1907 Fournier d'Albe a proposé un modèle qui permettait d'expliquer pourquoi un univers pouvait être infini et avoir le fond du ciel noir. C'est un modèle irréaliste avec des étoiles réparties de façon régulière , quelque chose de fractal…
On part d'un point autour duquel sont disposés 4 points donnant une figure , autour de cette figure on dispose 4 figures identiques etc.. ceci dans tous les sens . C'est une structure fractale , parfaitement auto similaire (on disait hiérarchisée à cette époque).
Le nombre de morceaux 5
Le rapport de similitude 5
La dimension fractale log 5 / log 5 = 1
C'est un ensemble de points de dimension topologique d = 0 et de Dimension fractale D =  1
Dans ce modèle on a une répartition de points lumineux sur un fond noir qui peut être étendu jusqu'à l'infini . Il pouvait exister des répartitions d'étoiles pour lesquelles la densité moyenne ne peut pas  être mise en avant , car il y a toujours des "trous" , il n'y a pas de densité moyenne .
Si l'univers était formé d'étoiles réparties aléatoirement avec une densité moyenne uniforme quelle serait sa dimension fractale? Elle serait égale à 3 , à la dimension topologique , avec une répartition des masses homogène c'est comme une sphère pleine , sa masse serait r3 .
Donc le ciel noir permet de dire que ce n'est pas une sphère.
Si la dimension fractale est égale à 2 l'ensemble d'étoiles se comporte comme une surface qui tapisse la voûte céleste  , cela veut dire que le ciel serait blanc ( 2 > D > 3 )
Nécessairement D doit être < 2 .
Si l'on veut prévoir l'expansion et l'avenir de l'univers on est parti de modèles établis par Einstein , ces théories prévoyaient une densité moyenne constante , ce qui est en contradiction avec le paradoxe .
L'expansion fonctionne très bien avec ces modèles  , d'où l'idée qu'à très grande échelle la densité moyenne est  constante et l'univers se comporte comme un tel système mais en expansion et en dessous de cette échelle il faut chercher une dimension fractale . (Mandelbrot).
On a évacué trop rapidement l'idée d'une dimension fractale <3 lorsqu'on est dans des distances faibles .En 1995 à l'ENS à Lyon une thèse des mesures ont permis d'affirmer que l'univers a une structure fractale .
En connaissant une partie de cette structure fractale auto similaire on peut donc connaître la structure de l'univers tout entier.
Lorsqu'on observe une l'image d'un nuage interstellaire de 3000 al et un nuage de la galaxie de 6 al on observe un aspect identique .
La méthode consiste à tracer des cercles concentriques (ou des secteurs) et à compter le nombre de pixels . on trouve alors que la masse (des pixels ) est  approximativement  RD où D est la dimension fractale  .On trouve D= 1,7
Une image des amas de galaxies  composée d'une compilation de tous les résultats des mesures donne une image qui présente des trous et des accumulations .(sauf dans la direction de l'équateur galactique de la Galaxie ).La mesure pour ces amas donne  D = 1,7

Peut-on donner une explication ?
Les nuages interstellaires sont formés d'hydrogène, de monoxyde de carbone sous forme atomique et moléculaire , de poussières  à une température de 10 K soit –263° C .. La méthode d'étude est basée sur les raies d'émission du monoxyde de carbone en ondes millimétriques  , on constate que ces nuages ont une structure fractale de dimension D= 1,7.
Pour les galaxies on distingue le groupe local formé d'une vingtaine de galaxies , les amas de galaxies de quelques milliers d'unités (Virgo) et le super amas local et là aussi on trouve  D= 1,7.
Le bilan de cet ensemble de mesures confirme la structure fractale dans un très grand domaine de 10-4 al à 109 al qui correspond au 1/10 de la taille estimée de l'univers . La structure fractale existe donc dans un domaine de 13 ordres de grandeur.
Pourquoi y a t il ce large domaine ?
Le modèle doit être indépendant d'échelle . On pense évidemment à la gravitation (et non à la force nucléaire).
Les gros nuages sont soumis à leur propres forces de gravitation, ils se rétractent progressivement et leur densité au centre augmente . Quand le centre devient trop dense par rapport aux bords , la situation devient instable et cela conduit à la fragmentation en nuages plus petits , puis le même processus reprend avec ces nuages .
Les fragmentations successives durent tant que la chaleur produite par la compression est rayonnée dans l'espace  et s'arrêtent lorsque le nuage trop dense devient opaque à son propre rayonnement thermique . La limite inférieure correspond à un nuage de 10-4 al et à une masse équivalente à Jupiter.
Pour les galaxies considérées comme des points matériels dotés d'une masse  le modèle est valable jusqu'aux très grandes distances 109 al au delà l'expansion de l'univers l'emporte sur la gravitation .

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Christian NITSCHELM Chercheur associé à l’Institut d’Astrophysique de Paris

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les paragraphes de l'exposé de Christian NITSCHELM